Le Centre Durocher: nouvelles récentes

Publié le 3 février 2015

Par Marc Boutin

En décembre dernier, alors que le Comité des citoyens et des citoyennes de Saint-Sauveur faisait une conférence de presse pour proposer la transformation du Centre Durocher en maison de la culture, Action-Habitation rendait public ses plans pour un projet résidentiel sur l’emplacement même d’un Centre Durocher démoli. Question d’amoindrir le choc, Actionhabitation préconisait de conserver la façade de la tour pour servir de paravent à son projet.

De l’utilité du façadisme

Pour satisfaire aux exigences de la Commission d’urbanisme, Action-habitation a choisi de conserver la façade de la tour art-déco du Centre Durocher et de s’en servir comme devanture pour son projet de logement social. Il s’agit là d’un vieux truc qu’on appelle en architecture : l’art du façadisme.DESSIN MARC 2

Avec le façadisme, on ne tient plus compte de la fonction originale d’un édifice — dans le cas qui nous occupe, un centre communautaire — mais seulement de son « enveloppe ». On pourrait croire, de la part du promoteur, à une volonté de sauvegarder la mémoire collective du quartier et d’amoindrir la douleur des citoyens d’avoir perdu un lieu qui jadis leur appartenait et dont ils ont été bannis. Mais, soyons plus terre-à-terre : le façadisme peut aussi servir à cacher la banalité architecturale du bâtiment principal qu’on projette de construire. L’architecte du projet nous répondrait sans doute que l’objectif « de son client » est de répondre aux exigences de la Ville.

Jusqu’à maintenant, la façade de la tour art-déco a été bien utile à Action-habitation pour embellir les images. On nous a épargné d’ailleurs, jusqu’à maintenant (Sam Auger, Le Soleil du 12 décembre), l’élévation nord du projet, celle du côté du parc, et donc de la rue Saint-Vallier où le projet résidentiel apparaîtrait dans sa nue splendeur, « avec pas d’tour ».

De l’utilité de l’amiante

Quand on veut tuer son chien, on l’accuse d’avoir la rage, d’avoir des faiblesses structurelles et de coûter trop cher d’entretien. Madame Gilbert, la conseillère du quartier, s’entête à vouloir démolir le Centre Durocher. Il y a un an, elle annonçait au Conseil de Ville que, selon un étude des ingénieurs de la Ville, il en coûterait 23 millions $ pour rénover le Centre Durocher, à cause de la présence d’amiante dans les murs et de soi-disant défaillances dans les fondations.

Bien entendu, le Comité de sauvegarde du Centre Durocher a voulu avoir copie dudit rapport et a fait appel aux responsables de l’accès à l’information de la Ville de Québec. On leur a répondu d’abord qu’on cherchait le rapport, ensuite qu’on ne le trouvait pas, enfin qu’il existait mais que la Ville, selon la loi, avait le droit de ne pas le montrer si ça pouvait lui nuire (sic). Pendant ce temps, au département de la gestion immobilière de la Ville, là où un tel document — s’il existait — devait normalement aboutir, on a admis qu’aucun document de cette nature n’avait été vu mais qu’on cherchait toujours. Bon, passons. La prochaine fois, on n’aura qu’à s’adresser directement au département de la vérité municipale.

Côté amiante maintenant. Des experts indépendants, dûment consultés par le journal, nous ont appris que :

1- l’amiante ne cause aucun problème tant qu’on n’y touche pas. Ce qui est néfaste, c’est la poussière d’amiante et non l’amiante en panneaux ou intégré au plâtre.

2- Il en a coûté 150 000 $ pour éliminer l’amiante de l’école Saint-Maurice sur la 8e Avenue à Limoilou, il y a de ça une quinzaine d’années. Cette école est comparable en dimension au Centre Durocher. On peut présumer que pour le double de cette somme, peut-être 400 000 $, le problème de l’amiante au Centre Durocher pourrait se régler, si problème il y avait. 23 millions pour ce faire, c’est un peu fort.

De l’utilité du développement durable

Conserver le Centre Durocher pour en faire une maison de la culture reste de loin la solution la moins dispendieuse dans ce dossier. D’abord, on sauve sur le prix de la démolition (5 à 700 000 $). Ensuite, on sauve sur le prix pour conserver et solidifier la façade de la tour. Elle existe déjà et est très solide telle quelle.

Assez rapidement, l’édifice dans son état actuel pourrait être occupé (c’est déjà le cas avec le CPE). Puis, on le rénove par étapes : d’abord on agrandit le CPE, ensuite on se prépare à accueillir une succursale de la bibliothèque municipale et, enfin, on voit à implanter une maison de la culture dans ce qui reste d’espace disponible incluant la grande salle. Un prix ne dépassant pas celui de l’évaluation de l’édifice (2 400 000 $), et dont le coût réel serait étalé sur plusieurs années, devrait suffire pour réaliser un projet original destiné à tous les résidants de Saint-Sauveur.DESSIN MARC 3

Quant au projet de logement social, la place tout indiquée pour le construire est le stationnement, coin Carillon et Saint-Vallier. Le terrain appartient à la Ville et sa superficie dépasse celle du Centre Durocher. Plus besoin de dépasser quatre étages pour placer les 64 logements : on évite les ascenseurs et les couloirs en construisant des logements transparents, séparés par des murs mitoyens. Des milliers d’exemples en ce sens existent déjà dans Saint-Sauveur. Y penser c’est déjà y consentir !

De l’utilité d’être élu

Évidemment, madame Gilbert ne veut rien entendre de ce discours. Elle est élue et peut faire à sa tête. C’est là son droit, mais elle reçoit tout de même salaire pour représenter la volonté des citoyens de Saint-Sauveur. Or à ce jour, deux mille deux cent personnes ont signé une pétition pour s’opposer à la démolition du Centre Durocher. À la seule assemblée publique sur cette question — convoquée par le Comité de citoyens et non par la Ville — 39 participants sur 40 étaient contre la démolition et c’est là qu’est née l’idée d’une vocation « culturelle » pour l’édifice.

Jusqu’à maintenant, les partisans de la démolition — madame Gilbert en est une — sont restés discrets. Ils n’ont pas fait circuler de pétition, ni organisé d’assemblée publique pour faire face à la musique. Se pourrait-il que leur intuition les guide vers une évidence : une forte majorité de sauveurois et de sauveuroises qui s’intéressent à leur quartier veulent conserver le Centre Durocher de la rue Carillon et aimeraient voir s’y installer des fonctions qui font défaut au quartier comme une bibliothèque et/ ou une maison de la culture ?

Mais madame Gilbert est élue; elle n’a pas à se soucier outre mesure de la volonté populaire pour toucher son salaire.

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