Le procès de Lynda Forgues et Déliane Laflamme s’est tenu les 11 et 12 mars 2019 à la Cour municipale de Québec. Une vingtaine de personnes y ont manifesté, en soutien aux accusées.
Au cours des dernières années, Lynda Forgues a signé de nombreux textes sur le droit de manifester dans Droit de parole; voilà qu’elle est maintenant accusée en lien avec sa participation à une manifestation en marge du G7. Alors que les deux femmes se voient porter un chef d’accusation pour attroupement illégal, Lynda Forges est également accusée de port d’arme dans un dessein dangereux. Le juge rendra sa décision le 27 mai.
Lynda Forgues avait en sa possession un répulsif canin, objet qui ne peut être considéré comme une arme que s’il est employé comme tel. Pourtant, elle ne l’a jamais sorti de son sac à dos, Il est donc difficile de comprendre pourquoi une telle accusation peut être portée contre elle. Pendant l’audience, le juge jouait avec son stylo. Il a alors lancé : « mon stylo pourrait être une arme ou non, selon l’utilisation ». Oui, Monsieur le Juge.
La Couronne a présenté des vidéos de surveillance. On y voit un affrontement entre les policiers et un groupe de manifestants lors d’une manifestation « surprise », le 8 juin dernier, qui avait bloqué l’intersection Honoré-Mercier et Côte de la Potasse. La police avait alors déclaré la manifestation illégale et avait ordonné aux participants de se disperser, ce à quoi tous avaient obéi, dans le calme.. On remarque dans l’enregistrement deux divans sur la chaussée qui s’enflamment, et on voit ensuite Lynda et Délaine quitter la manifestation, se dirigeant vers le quartier Saint- Jean-Baptiste. À aucun moment on ne constate que la police les a alertées d’une quelconque infraction criminelle.
C’est au moment où les flammes sont apparues que le lieutenant Steve Picard aurait déclaré qu’il s’agissait non plus d’une manifestation illégale, mais d’un attroupement illégal, crime passible d’emprisonnement pour ceux qui y en sont les auteurs, et non pas d’une simple amende. Il semble toutefois que les manifestants n’en aient jamais été informés. Lors de son témoignage en cour, le lieutenant Picard a affirmé que le rassemblement n’était pas « sécuritaire » parce que les manifestants n’étaient pas « contenus », et donc pas « statiques », de façon à ce qu’ils puissent bien comprendre les avertissements des policiers. Il a ajouté que la police « ne courait pas après les gens juste pour les aviser ».
Alors que les enregistrements vidéos devaient servir de preuve pour inculper les accusées, il semble plutôt qu’ils faisaient perdre toute crédibilité aux arguments de la Couronne, puisqu’ils montraient bien que Lynda et Déliane étaient loin des divans qui brûlaient, qu’elles étaient pacifiques, et qu’elles quittaient la manifestation dans le calme.
Au moment de leur arrestation, dans une ruelle du quartier Saint-Jean-Baptiste, elles sont restées pacifiques et coopératives. Attroupement illégal ? Elles n’en savaient rien. La Couronne semble cependant croire qu’elles pouvaient avoir participé à un attroupement illégal dont elles en ignoraient l’existence. Il faut souligner l’excellent travail des avocates de la défense, Me Sandra Villeneuve et Me Carol-Ann Gagnon, qui ont soulevé des questions fort pertinentes, rappelant que les questions en litige dépassaient largement les accusations : Y avait-t-il réellement un attroupement illégal selon le code criminel ? L’arrestation sans mandat était-elle illégale? Elles ont également demandé si la détention de quatre jours n’était pas disproportionnée, si; les objets saisis étaient vraiment inadmissibles et si les conditions de libération n’étaient pas abusives. Elles ont également insisté pour savoir qui avait donné l’ordre d’arrestation, et pour quelles raisons.
La Couronne a plaidé que « tout le monde [était] de bonne foi ici ». Mais la procureure Me Marie-Hélène Guillemette avait à répondre à plusieurs questions embarrassantes sur la nature irrégulière de l’arrestation, la détention, les saisies, les conditions de libération. Elle devait aussi s’expliquer quant à la justification des accusations, alors que les accusées n’ont vraisemblablement posé aucun geste violent, qu’elles n’ont commis aucun méfait, et qu’aucune intention criminelle n’était finalement démontrée.
Quand on est de bonne foi, il faut être conséquent. Quand la Couronne présente des vidéos qui prouvent l’innocence des accusées, c’est le monde à l’envers. Pour ceux et celles ayant contribué à la campagne de financement, sachez que le travail des avocates de la défense méritait bien votre appui. La campagne reste ouverte jusqu’au 7 mai prochain.
Les explications manquaient cruellement à la suite des arrestations, ce qui nous laisse croire que la Couronne tente, par ces accusations criminelles, de justifier rétroactivement les dépenses de 300 million $ pour la sécurité du G7. Ne fallait-il pas accuser quelques personnes pour conserver un minimum de crédibilité ?
Félicitations, très bel article qui donne un éclairage bien différent que ce qui a été véhiculé dans les médias.
Pour contribuer, c’est à ce lien qu’il faut aller (ce serait bien de le rajouter dans l’article) :
https://fr.gofundme.com/leves-de-fonds-pour-les-arretees-du-g7
C’est fait!