Les libertariens à l’assaut de la santé publique

Publié le 11 octobre 2013

Par Étienne Lantier

Face à la mauvaise presse, le modèle privé n’a jamais eu meilleure mine au Québec. Il promet un accès plus rapide à un médecin de famille que dans le système public. Cette disponibilité a un prix. Une consultation de 30 minutes avec un médecin coûte environ 200$. Malgré tout, la clientèle est au rendez-vous et de nouvelles cliniques privées ne cessent d’ouvrir.

Nous avons constaté que les promoteurs du privé en santé se regroupent autour de certaines idées politiques de droite. Pour en avoir le cœur net, voici un portrait de quelques-uns des acteurs de premier plan de ce nouveau modèle.

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Le Parti conservateur du Québec

Plusieurs promoteurs des cliniques de santé privées se regroupent au sein du Parti Conservateur du Québec (PCQ). Ce nouveau parti d’allégeance libertarienne, fondé en 2012, a reçu l’appui de nombreuses personnalités publiques influentes. Il est dirigé par Adrien Pouliot, fondateur de l’ancien réseau de télévision TQS et de l’Institut Économique de Montréal (IEDM). Il compte le docteur Jacques Chaouli dans son exécutif. Sous son initiative, les assurances privées sont rendues légales par un jugement de la cour suprême partout au Canada en 2005.

Qu’est-ce qu’un libertarien ?

Les libertariens envisagent les lois du marché, comme étant les meilleurs garants de la liberté individuelle. Ils considèrent que l’État est nuisible. Éric Duhaime, Johanne Marcotte, André Arthur et Jeff Fillon se déclarent libertariens; et ils ne tarissent pas d’éloges envers le PCQ. Une idée phare des libertariens est celle du penseur Milton Friedman, pour qui : « Une entreprise est immorale et ne doit viser rien d’autre qu’à faire du profit ». Cette philosophie politique ne doit pas être confondue avec celle des « libertaires » qui, eux, refusent toute forme d’autorité illégitime.

Le Dr. Lacroix

Marc Lacroix est un pionnier des cliniques privées. « J’ai choisi de changer le système en inventant moi-même un système », affirme-t-il en entrevue avec Droit de parole. En 2009, il fonde à Québec la première clinique d’un réseau, les Cliniques médicales Lacroix. Il multiplie les liens avec des partis politiques. Selon la loi, un médecin ne peut pas pratiquer simultanément dans le public et dans le privé. Il doit faire un choix entre les deux. En 2007, Dr. Lacroix soumet un projet-pilote de système de santé mixte privé-public à l’Action démocratique du Québec (ADQ). Puis, le parti de centre-droit, la CAQ, en fera une proposition de son programme électoral. Aujourd’hui, visiblement déçu par la CAQ, M. Lacroix décide de participer, les 19 et 20 octobre prochain, au congrès du Parti Conservateur du Québec (PCQ). Il a son chef, Adrien Pouliot, en plus haute estime : « Le PCQ incarne une solution lucide et réaliste de ce que devrait être le système de santé au Québec », affirme-t-il ajoutant n’être membre d’aucun parti.

Ayant travaillé 10 ans dans le système public, le Dr. Lacroix trouve ce système inefficace, couteux, lourd et bureaucratique. Il estime que le privé est appelé à occuper plus de place à l’avenir, compte tenu des lacunes du public. C’est la rengaine habituelle de la droite qui dénigre le système public pour valoriser le privé. Cette position est la même que celle de l’Institut économique de Montréal (IEDM) comme on peut le constater sur le site web des Cliniques Lacroix. En outre, monsieur Lacroix collabore régulièrement aux émissions de Radio X Québec et à la Radio-pirate. Le réseau compte plusieurs cliniques dans la région, dont une à Sillery. Une autre ouvrira bientôt dans le quartier Montcalm. Le Dr. Lacroix vise l’extension de son réseau à travers toute la province.

L’opinion d’Alain Vadeboncoeur

Pour contrer tout cela, nous avons demandé l’avis d’Alain Vadeboncoeur, porte- parole des Médecins québécois pour le régime public, sur la sélection des clients dans les cliniques privées. Il se demande si « ils ne vont pas faire une sélection en laissant les cas lourds au public pour ne conserver que les cas légers ». « Le profit voisine très mal avec la volonté de donner les meilleurs soins à ceux qui en ont besoin » affirme M. Vadeboncoeur. Selon lui, « le privé ça biaise les actions. Tu vas faire des choix pour faire un maximum de profit et non pour corriger le problème ».

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