Par Michaël Lachance
Jusqu’au 4 janvier, au Fou-Bar, l’artiste-peintre de Québec Paule Genest présente quelques morceaux choisis glanés dans sa production récente. Peintes entre 2006 et 2012, la dizaine d’oeuvres à l’acrylique sur toiles ont toutes comme sujet, ou presque, une représentation fantasmagorique de la nature ; une nature sensuelle, poétique et touchante. La peintre que l’on connait pour ses apparitions répétées, mais non répétitives, dans les galeries, les bars, les centres d’art et, parfois même, au Musée, produit selon son rythme, ses humeurs, sans fracas ni insistance, elle peint comme elle vit, au gré du temps clément et des saisons inspirantes.
Grands et petits formats se côtoient dans ce bar de la rue Saint-Jean, exigu et chaleureux. Cela permet un rapport intime avec les tableaux, une proximité avec la poésie visuelle de Paule Genest. Car, c’est bien le charme et la poésie des oeuvres de l’artiste qui nous séduit d’emblée. Sans ésotérisme exacerbé, sans religieux, ni morale, l’artiste oblige une réflexion, un point d‘arrêt (épokê) contemplatif, une contre-plongée philosophique. Les paysages sont prétextes et sujets chez l’artiste-peintre pour nous faire découvrir toute la sensualité qui habite son monde intérieur.
La mélopée du chêne, œuvre qui coiffe ce papier, s’inspire, entre autres, de Philémon et Baucis, un récit que l’on dégote uniquement dans Les métamorphoses, d’Ovide, tout comme de la nature, qu’elle visite avec esprit et spiritualité. Si chêne et force en latin se disent pareillement, c’est-à-dire, «robur», qui signifie «force» (morale et physique), il n’est pas du tout anodin de la recouvrer dans le travail de la peintre.
Car, s’inspirant du mythe ovidien voulant que le couple humble et amoureux ne se soit pas trouvé de logis en se cognant le nez contre toutes les portes d’une contrée, Zeus, en rasant la contrée pour punir ses habitants et transformant chaque maison en temple et proclamant Philémon et Baucis gardiens de ces temples, les transformera dans le vieil âge en chêne et en tilleul, afin que leurs amours persistent encore des siècles durant. La mélopée est une forme de chant souvent monotone et triste, l’oeuvre sur toile de l’artiste, d’une facture romantique, évoque cet accablement, cette monotonie que l’on rencontre au passage des saisons. Or, manifestement, ce n’est pas cette monotonie qui envoute, mais bien l’aspect hivernal et diaphane de décembre, que l’on trouve dans nos contrées neigeuses.
Plus des oeuvres sensuelles que spirituelles, plus invitant dans un bar autour d’une musique jazz que dans une galerie, le travail de Paule Genest mérite que l’on s’y attarde une soirée, un après-midi, autour d’une bière ou d’un verre de vin. Le lieu charmant se prête si bien aux tableaux de l’artiste, qu’il serait de bon ton d’y faire une saucette dans le temps des Fêtes, pour ne pas oublier qu’il y a, bien sûr, la nature, mais, aussi, la peinture !
Jusqu’au 4 janvier au Foubar, rue Saint-Jean.