Le problème, c'est l'automobile, qu'elle soit électrique ou pas

Publié le 19 octobre 2015

panneau congestionPar Marc Boutin

Ma naïveté est sans bornes. Jadis, quand j’entendais l’expression « électrification des transports », j’étais convaincu qu’on parlait strictement de transports collectifs, de transport par métro, par tramway, par train aérien ou terrestre, par autobus.

Mais voici qu’en ce début d’octobre, je me fais déniaiser par nul autre que notre ineffable ministre de l’environnement, David « le Déverseur » Heurtel. Dorénavant au Québec (du moins d’ici 2020), quand notre gouvernement libéral parlera d’électrifier les transports, il parlera de transport privé.

Quand il est question d’automobiles, oubliez l’austérité. Le gouvernement Couillard compte consacrer 421 millions de dollars sur cinq ans pour que le nombre de véhicules électriques passe de 7 300 à 100 000 sur nos routes. Pour les autos électriques, les traversiers et les ponts à péage seront gratuits, des voies réservées leur seront attribuées sur les autoroutes urbaines, les bornes de recharge publiques se multiplieront et une subvention pouvant atteindre 8 000 $ sera disponible pour l’achat d’une voiture électrique neuve.

Dépendance à l’automobile

Voilà de belles intentions, sans doute rentables au plan électoral, mais qui ne réduiront en rien notre dépendance à l’automobile. Selon la tendance des dernières années, le parc automobile du Québec augmentera de 500 000 autos d’ici 2020. Que le cinquième de ces autos soient électriques ne changera rien au fait que la pollution de l’atmosphère ira s’accentuant au rythme de la croissance du nombre des automobiles à énergie fossile.

C’est donc l’ensemble du parc automobile qu’il faut d’abord chercher à réduire si on veut vraiment émettre moins de gaz à effet de serre. Et pour ce faire, il faut valoriser et subventionner le transport collectif et non le transport privé, que celui-ci soit électrique ou non.

Les coûts reliés à l’automobile et à son corollaire, l’étalement urbain, dépassent l’imagination. La liste est longue : coûts des nouvelles infrastructures de voirie, déneigement et entretien des voies publiques, soins de santé dus aux accidents de la route et à la pollution, surveillance policière, assurance-auto, perte de temps pour se rendre au travail (en moyenne 7h par semaine, 40 jours de travail perdus par année), coût et entretien d’une voiture, coût du stationnement (utilisation et construction), coût énorme des infrastructures urbaines (égouts, écoles, nouveaux services) de la banlieue proche et lointaine et j’en oublie. Le gros de ces dépenses n’est pas assumé par l’utilisateur mais bien par l’État.

Québec, ville loin de se densifier

L’automobile monopolise une quantité démesurée d’espace. Pour se plier à l’automobile, l’agglomération de Québec, entre 1950 et 1975, a vu son territoire s’accroître de 2 500 %. Un rapport de un à 25 entre la superficie de la ville à échelle humaine d’avant 1950 et la superficie de celle d’aujourd’hui à 95 % consacrée à l’automobile. Plus on vit loin du centre-ville urbain (les quartiers centraux de Québec), plus on vit sur le bien-être public.

Subventionner l’électrification du parc automobile va sans doute séduire quelques environnementalistes; mais négliger les transports collectifs, c’est passer à côté d’un vrai problème de société, celui de la « désurbanisation » de notre milieu de vie.

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