Plan d'action en santé mentale 2015-2020

Publié le 19 octobre 2015

Par Gilles Simard

En plus d’un énorme sentiment de déception, c’est l’image d’un gâteau brûlé n’ayant pas levé qui m’est venue en tête, en écoutant le ministre Gaétan Barrette énoncer les grandes lignes du Plan d’action en santé mentale (PASM 2015-2020). Et aussi, la désagréable impression d’entendre un politicien qui parle outrageusement des deux coins de la bouche et qui ne fait même plus mystère de sa volonté déchaînée de privatiser le réseau. À preuve, les frais accessoires en faveur des cliniques privées (50 M$), une brèche majeure qui pourrait couler tout le système de santé public québécois.

Pour ce qui est du Plan d’action, force est de reconnaître que malgré quelques paragraphes intéressants sur la primauté de la personne, l’implication des proches et l’accent mis sur la jeunesse, il consacre surtout l’approche biomédicale et hospitalo-centriste du ministre, au détriment des nombreuses pratiques alternatives possibles et de la psychothérapie accessible à tout le monde. Sur ce point d’ailleurs, et en dépit d’un appui unanime de tous les partenaires du milieu de la santé, le plan ne propose que quelques lignes sur une centaine de pages. Bonjour l’espoir ! Et dire qu’en plus, ce même gouvernement a trouvé le moyen d’enlever la prime des psychologues du secteur public… Quand on dit que Barrette veut privatiser !

Autrement, comment le ministre de la Santé peut-il avoir le culot de parler d’harmonisation, d’optimisation des soins et de meilleur continuum de services pour jeunes et vieux en santé mentale, quand on le voit annoncer des coupes de l’ordre de 700M$ ? Sans rire, par quel miracle du Saint Esprit les milliers de personnes employées d’un réseau déjà essoufflé, désorganisé, charcuté et grevé à souhait, pourraient-elles faire plus avec moins? Pensée magique du ministre, incompétence, cynisme ?

De même, comment prendre au sérieux un gouvernement qui parle de revaloriser ce « partenaire incontournable » qu’est le communautaire, mais qui n’arrive même pas à respecter l’entente déjà établie avec le gouvernement Marois (PSOC) ? On parle ici de 162 M$, une somme qui équivaut à un maigre 10 % de l’augmentation pharaonique consentie aux médecins (1.2G$) et qui pourrait à elle seule combler une partie des besoins criants des milliers d’organismes communautaires au Québec. Et encore, que penser d’un gouvernement qui, non content de vouloir assujettir ces mêmes groupes aux lois sur le lobbysme, s’entête à couper dans leurs budgets, au petit bonheur du jour, en raison d’une « austérité » de plus en plus décriée par tout le monde : regroupements, syndicats, ordres professionnels, et même par la Protectrice du Citoyen ?

Toujours sur le PASM 2015-2020, comment prêter foi à un gouvernement qui parle de loger décemment les personnes ayant un trouble en santé mentale, mais qui coupe allègrement dans des programmes reconnus comme AccèsLogis ? Un gouvernement qui parle de prévention et de réadaptation sociale par la citoyenneté et le travail, mais qui ferme des Centres de traitement pour toxicomanes et qui saborde des mesures aussi populaires et utiles que le programme PAAS (Programme d’aide et d’accompagnement social) d’Emploi-Québec ?

Cela dit, il est facile de produire des rapports pompeux et de se gargariser avec de beaux concepts vertueux tels le rétablissement, l’imputabilité des cadres et des établissements, l’utilisation des pairs aidants et tutti quanti… Mais, quand vient le temps d’en assurer la faisabilité et la viabilité par des moyens mesurables et quantifiables, c’est autrement plus difficile et compliqué. C’est pourtant là, dans l’effort consenti au ras du sol, que réside le seul vrai courage social et politique. Tout le reste n’est que billevesées néolibérales et bouillie pour les chats.

Et c’est malheureusement le cas pour ce rapport.

Un gros pétard mouillé.

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