La crise du logement et un tribunal «absent»

Par W. Stuart Edwards
Publié le 26 juin 2023
Photo: W. Stuart Edwards

Le 31 mai dernier, le Bureau d’animation et information logement (BAIL), le Comité des citoyennes et citoyens du quartier Saint-Sauveur (CCCQSS), le Comité logement d’aide de Québec Ouest (CLAQO), et la Ruche Vanier ont manifesté pour dénoncer l’inaccessibilité aux services de renseignements chez le Tribunal administratif du logement (TAL), surnommé pour l’occasion le Tribunal « absent » du logement.

Entraves à l’accès

Se présenter au TAL sans rendez-vous est désormais impossible. Un rendez-vous est nécessaire pour poser la moindre question à un agent ou une agente. Pour un rendez-vous pris en ligne le délai moyen est de quatorze jours. C’est un obstacle évident, surtout pour les gens qui ont de la misère avec les ordinateurs et l’internet. Les lignes téléphoniques sont surchargées et trop souvent elles raccrochent automatiquement. En dehors des grandes villes, les heures d’ouverture des bureaux sont réduites. Le bureau à Lévis n’existe plus ; les gens de Lévis doivent venir à Québec.

Toutes ces barrières à l’accès aux renseignements dissuadent les locataires de faire valoir leurs droits. Pour des raisons purement bureaucratiques, l’accès à la justice est bloqué. Dans le contexte de la crise du logement qui sévit actuellement à travers le Québec, les résultats sont dévastateurs pour de nombreux locataires. Comment contester une hausse de loyer abusive, une situation d’insalubrité, ou une rénoviction de mauvaise foi, quand le Tribunal est « absent » ?

Passe-moi ton bail

À l’approche du 1 juillet, grand jour de déménagement, le BAIL organise sa campagne annuelle « Passe-moi ton bail ». Dans la fameuse clause « G » du bail, un propriétaire est censé inscrire le montant payé par l’ancien locataire. Très souvent ils ne le font pas, par exemple quand le nouveau loyer est nettement plus élevé que l’ancien. Le BAIL demande aux anciens locataires de « passer leur bail » au nouveau locataire pour qu’il ou elle puisse demander une fixation de loyer auprès du TAL.

Un registre facultatif

L’organisme Vivre en ville a dévoilé son « registre » des loyers . Sur une base volontaire, un locataire pourrait y mettre le montant de son loyer. Le site affiche une carte interactive qui dresse un portrait partiel des loyers payés dans un tel ou tel quartier. Ça permet de se comparer au marché ambiant, à condition que les données soient fiables. Les groupes de défense des locataires réclament depuis longtemps un registre public et universel pour l’ensemble des logements locatifs, sans exception. La clause G et un registre volontaire ne suffisent pas.

Ça prend un Tribunal

Dans la campagne Passe-moi ton bail et le «registre Vivre en ville, on pourrait se demander à quoi ça sert de s’informer quand le Tribunal manque à l’appel. La crise du logement est bien réelle et il y a un énorme besoin d’avoir accès à un TAL qui fonctionne. Quand le Tribunal est «absent», la crise est exacerbée et les droits des locataires sont brimés. Nicolas Drolet de la Ruche Vanier l’exprime bien : «L’urgence de la situation commande au TAL d’agir dans les plus brefs délais et de garantir le plein accès à ses services, en levant notamment l’obligation de prendre rendez-vous pour rencontrer d’un.e de ses agent.es de l’information.»

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