Îlot Dorchester, îlot de résistance

Par Nathalie Côté
Publié le 16 avril 2025
La citoyenne de Saint-Roch Vicky Plourde le 10 avril à l’ÉNAP. Photo: NC

Devant une salle comble, le promoteur Trudel a présenté la 2e version de son projet immobilier à venir sur le terrain de l’îlot Dorchester, dorénavant de 17 étages. Principal changement au plan : la section de 150 chambres d’hôtel serait désormais au rez-de chaussée. Le complexe immobilier est composé de 400 logements, dont quelques 5 et demi nouvellement ajoutés. Malgré les modifications au projet, la foule présente s’est positionnée contre la dérogation de zonage limité actuellement à 10 étages.

Les représentantes et représentants de l’administration municipale, de même que le conseiller de Saint Roch–Saint-Sauveur, ont dû défendre le projet du promoteur Trudel en plus d’une pluie de critiques du processus même de consultation. Tout cela semblait, en effet, cousu de fil blanc. Le maire Bruno Marchand avait déjà affirmé qu’il appuyait le projet, avant même d’avoir reçu l’avis de la Commission d’urbanisme (qui produira son rapport à la suite de cette soirée de consultation et à l’analyse des mémoires déposés à la Ville).

La Ville parlait technique, les citoyens : d’idéaux démocratiques. Les propos de Nicolas Saucier, ancien président du conseil de quartier de Saint-Roch, résument l’état d’esprit de cette soirée de consultation : « Ce qu’on nous propose, c’est de passer d’un gabarit de 10 étages, à 17 étages. Quand j’entends le maire dire “je donne le go”, et qu’il y a une petite soirée de consultation qui va avoir lieu, c’est assez insultant pour les citoyens. Ça laisse sous-entendre que derrière des portes closes, tout s’est réglé avec le promoteur ». Il a nuancé : « Je crois en la démocratie municipale et j’espère encore, et c’est pour ça que je suis ici ce soir, qu’on va nous écouter. »

Geneviève Barry, résidente de Saint-Jean-Baptiste, a fait un vibrant plaidoyer : « Je suis très déçue de la décision qui a été prise par le maire Marchand et son équipe de donner son aval pour un projet qui est surdimensionné et qui n’est pas socialement acceptable. Je me sens trahie, je suis en colère et je me sens impuissante », a-t-elle dit en interpellant la vibre philanthropique du promoteur : « Il est toujours temps de modifier le projet actuel et d’en faire un à échelle humaine et socialement accepté par les gens de Saint-Roch et de Saint-Jean-Baptiste. » Elle a lancé : « Plutôt que de simples promoteurs à la recherche de profits, les Trudel pourraient devenir les héros de Saint-Roch ! »

Pierre-Luc Lachance, conseiller municipal de Saint Roch-Saint-Sauveur, a dû défendre la légitimité de la démarche municipale : « On prend des notes et, en suite, il va y avoir un processus d’adoption. C’est un processus décisionnel qui est encadré par Loi. C’est un processus décisionnel qui est très démocratique. On est élu pour faire ce genre de travail là. » Il a rappelé que tous les élus (sauf une Jackie Smith de Transition Québec) sont en accord avec le projet.

Le représentant du promoteur a fait de son mieux en mettant en valeur la culture philanthropique de l’entreprise, en rappelant qu’il accueille gratuitement l’organisme la Bouchée généreuse à Fleurs de Lys, etc.

On ne gouverne pas à coup de décret

La résidente de Saint-Roch, Vicky Plourde, a contribué au crescendo du débat dans une envolée sur la démocratie : « L’État de droit, c’est pas juste la démocratie, c’est pas juste qu’on puisse voter. L’idée c’est que la Loi est au-dessus de tout le monde, même des élus. » C’est pas l’arbitraire… On peut pas gouverner à coup de décret, comme on voit ce qui se fait actuellement. […] Les élections municipales s’en viennent. C’est plus important que jamais d’avoir ce souci-là. Et j’espère que le maire nous entend ! La démocratie est menacée partout dans le monde. J’espère qu’on va juste un p’tit peu faire notre part à Québec, pour l’avancement de la démocratie. Il faut tout mettre en œuvre pour maintenir ce sentiment de démocratie », a-t-il affirmé.

Une fonctionnaire de la Ville, touchée, a défendu la démarche de consultation, en précisant : « On n’est pas au-dessus des lois, on est à l’intérieur des lois. […]. Vous savez, ce n’est pas simple de prendre des décisions. […]. À aucun moment, on a pris une décision qui faisait l’unanimité. Je dirais à l’intérieur de l’équipe, mais aussi auprès de l’ensemble de la population. » Elle a souligné qu’il y a des opposants au projet, mais aussi des gens à qui ça fait l’affaire.

Dépôt de la pétition

Jimmy Boyer a déposé la pétition de 1500 signataires demandant que la Ville respecte le PPU à 10 étages. L’artiste Hélène Matte, comme plusieurs intervenantes, a rappelé que le projet immobilier ne comprend aucun logement social, malgré le discours du promoteur. « Après que le maire ait donné son OK, nous sommes maintenant consultés en ce 10 avril, sans possibilité de référendum. C’est très peu. Très tard […] », a-t-elle lancé.

Les propos de Pierre Maheux, citoyen engagé de longue date dans Saint-Roch, résument l’état d’esprit de la soirée : « Je ne poserais pas de question sur la dé rogation de zonage, c’est déjà réglé. » Une citoyenne a rappelé les propos mêmes de Bruno Marchand : « Comme l’a dit le maire en 2023, on veut une densité heureuse sans gratte-ciel. »

Une résidente de Saint-Sauveur a résumé : « On a un projet qui va bien au-delà du PPU. Ce soir, on nous présente un projet qui est modifié. D’ailleurs, je salue les modifications faites. Cependant, en octobre, on nous disait que c’était impossible de faire des modifications. On nous présente aujourd’hui un projet révisé. Est-ce qu’on nous donne les bonnes informations pour la justification du non-respect du PPU ? J’aimerais avoir plus de transparence», a-t-elle revendiqué.

Un référendum demandé

«J’espère que la consultation de ce soir, a noté un travailleur de Saint-Roch, n’est pas qu’une manière d’instrumentaliser le processus de consultation publique. Il faut cesser de voir le projet sur la question de vue et de hauteur. Ce qui est en jeu, c’est la qualité de vie dans Saint-Roch à une échelle humaine et le respect de la démocratie municipale. Nous demandons à la Ville le respect du PPU. » Ajoutant : « Si le projet est si bon, que la Ville fasse un référendum. »

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